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Portrait : Jean-Loup Guibert
 

AVARANEWS N° 57 - JANVIER  2023


Jean-Loup Guibert, fondateur
et premier président de l’Avarap

 

Photo TXT 2 Jean-Loup Guibert

 

 

En 2024, l’Avarap fêtera ses 40 ans. Au fil des années, les valeurs de l’association, portées par des bénévoles investis, et ses objectifs, n’ont pas varié : aider des cadres à se réinventer un projet professionnel en accord avec leurs aspirations et réaliste par rapport au marché. Les « pères fondateurs » peuvent être fiers du travail accompli : plus de 25 000 cadres ont été accompagnés. Nous avons demandé à Jean-Loup Guibert, l’une des personnes à l’origine de notre association dont il a été le premier président, de nous raconter les circonstances de sa création.

 

Jean-Loup Guibert se souvient : « En 1984, alors que je travaille comme directeur d’un bureau d’études en ingénierie immobilière, je m’aperçois que certaines prestations de ce cabinet sont payées en Suisse et pas en France. Je fais part de mon indignation. Mon attitude n’est pas du goût des actionnaires et me voici au chômage. J’ai 44 ans et je choisis de faire une pause et de m’inscrire à un stage de formation à la gestion organisé pour l’APEC par le Centre de Perfectionnement à la Gestion (CPG). Je me retrouve alors avec une vingtaine de pairs très sympathiques. Nous décidons de réfléchir ensemble à la façon de retrouver un emploi qui nous corresponde. De fil en aiguille, avec 7 personnes de ce stage parmi lesquelles se trouve ma future épouse Claude qui va beaucoup m’aider dans le développement de l’Avarap , nous créons en août 1984, une association : l’AVARAP, Association pour la Valorisation des Relations Avec les Professionnels, qui veut permettre à d’autres personnes en difficulté d’être accompagnées. »

 

La méthode Avarap se construit progressivement en quatre ans

Ce premier groupe se met au travail. Parallèlement, Jean-Loup Guibert, qui se passionne pour les sciences cognitives, un secteur en balbutiement en France – il n’y a pas alors, bien entendu, de chaire à l’université –, travaille avec des experts américains de Palo Alto pour une adaptation française. « Les sciences cognitives, précise-t-il, s’intéressent à la façon dont fonctionne le cerveau, non seulement sur le plan personnel mais aussi dans les interactions sociales. Il me semblait que ces connaissances seraient utiles dans la conduite des groupes que nous voulions lancer. »

Les réunions des premiers groupes – elles ont dès l’origine lieu à un rythme hebdomadaire sur une durée de six mois –  sont un champ d’expérimentation qui permet de jeter les bases de ce qui deviendra la méthode Avarap. Celle-ci doit beaucoup aux sciences cognitives expérimentales, (« Laborie, Berne, Bettelheim, Fromm, Garcia et autres n’avaient plus de secret pour moi. Cerveau gauche et cerveau droit étaient le centre de ma bible »…), à l’approfondissement réalisé lors de réunions mensuelles de parrains et d’animateurs (« Avec gueuleton à la clé bien sûr ! à la gauloise en sorte ! »), et à l’amélioration continue par des réunions mensuelles et un séminaire annuel. Sans oublier la rédaction du Guide Vert.

« Il nous a fallu plus de quatre ans, se souvient-il, pour préciser les trois phases (ce que je suis, ce que je veux être, ce que je vais faire) et pour dégager les grands principes de notre méthode : un groupe de 12 à 15 personnes, toutes cadres car la démarche est un cheminement intellectuel, venant d’horizons divers et souhaitant réfléchir ensemble à la poursuite de leur carrière. »

De ce premier groupe de fondateurs, trois personnes commencent à animer comme parrains les groupes qui se constituent. Jean-Loup Guibert animera 9 groupes entre 1985 et 1987 : « J’y ai pris mon pied et construit de solides amitiés », se réjouit-il.

Le développement est rapide. « Nous avons participé à un salon de l’emploi à l’Espace Austerlitz en octobre 1984 qui nous a permis de prendre beaucoup de contacts. Plus de 150 personnes ont fait part de leur intérêt pour l’association. Au bout d’un an, une dizaine de groupes fonctionnaient en permanence. Nous avons organisé la formation des futurs Parrains – un week-end en résidence au Château de Chamarande dans l’Essonne. Pour créer une ambiance amicale, il n’y avait pas mieux que ce magnifique parc avec la brume au petit matin ! , au cours de laquelle on apprenait les fondamentaux des sciences cognitives et on se familiarisait avec la méthode. Par la suite, l’APEC, nous a envoyé des candidats, convaincus de la pertinence de notre méthode. »

C’est pour pallier au petit nombre de Parrains que la décision est prise de limiter leur intervention à quatre mois puis de passer la main à un animateur.

 

Une présidence assurée pendant sept ans

Jean-Loup Guibert prend la présidence de l’association. Le siège social est fixé 18, rue Ferrus dans le XIVe, puis rue Emile Duclaux, dans le XVe où Jean-Loup possède un studio à côté de son appartement. Le bureau, constitué du président, du trésorier et du secrétaire, se charge de faire fonctionner l’association dont toutes les fonctions support (accueil, secrétariat, informatique, organisation) sont assurées par des bénévoles. Un Comité des Animateurs et Parrains est mis en place.

L’association bénéficie de l’usage gratuit d’une salle paroissiale qui est utilisée pour les réunions. Les parrains et animateurs se retrouvent une fois par mois pour échanger sur leur pratique. Les groupes se réunissent dans des arrière-salles de restaurants ou dans des structures qui les accueillent gratuitement. Les réunions durent 2h30 le soir de 20 heures à 22h30. Des réunions mensuelles d’information à destination des candidats sont mises en place. Rapidement, ce sont deux à trois groupes qui sont lancés tous les mois. En 1993, 32 groupes sont lancés…

Les services emploi des grandes écoles (HEC, Centrale, etc.) développent des partenariats avec l’Avarap. Plusieurs antennes régionales voient le jour pour éviter aux candidats vivant loin de Paris de faire le déplacement (Bordeaux, Nantes, Nice…). Et l’association poursuit sa route. En 1991, Jean-Loup Guibert quitte la présidence qu’il aura assurée pendant sept ans. Elle transfère son siège 90-92 rue du Moulin-Vert dans le XIVe en 1993.

 

Une carrière marquée par plusieurs « premières »

Né à Toulon en 1940 sous les bombardements, Jean-Loup Guibert va connaître une scolarité brillante et intègrera Centrale Paris. A sa sortie, il rejoint, comme ingénieur, le secteur des travaux publics et intervient dans nombre de chantiers de ponts, tunnels et gros équipements – il travaille ainsi sur le chantier du futur aéroport de Roissy. « Au bout de sept ans, se rappelle-t-il, je ressens le besoin de changer d’activité et je rejoins, comme ingénieur conseil spécialiste du bâtiment et des travaux publics, la banque BNP qui finance ce secteur d’activité. »

Il reste quatre ans à ce poste, le temps d’imaginer et de créer sa propre structure qui opère dans la rénovation des bâtiments avec une méthodologie novatrice. «  Nous avons mis en place, se réjouit-il,  des équipes pluridisciplinaires qui nous permettaient de diviser le délai de rénovation par 2. » Le travail collaboratif déjà ! Le succès est au rendez-vous. Mais la médaille a son revers : la société connaît des problèmes de trésorerie et ne réussit pas à financer ses besoins en fonds de roulement. La fermeture est inévitable.

Jean-Loup, qui déteste s’ennuyer, va poursuivre une carrière marquée par plusieurs « premières ». Il rejoint l’ANVAR dont une des missions est de contribuer financièrement à des projets de modernisation industrielle, entre à la BFCE/Natexis où il crée la banque d’affaires, lance la première société de portage salariale (Valor) qui sera forte de 700 consultants – l’équivalent de 170 plein temps –  et atteindra un CA de 15 millions d’euros.

 

Une fondation qui opère dans les pays les plus pauvres de la planète

Il se passionne pour Madagascar, une île découverte lors d’un séjour touristique en 2004 et s’y installe à temps partiel en 2005 pour lancer une activité de microcrédit qu’il transformera, sous la pression de la concurrence des établissements bancaires, en société de leasing. Sa vocation : financer des équipements ou des matériels pour les plus pauvres du pays. Il vend sa participation dans Valor en 2006 et s’installe à plein temps à Madagascar, une île qu’il quittera en 2010 à cause de problèmes de santé.

En 2008, il affecte une partie du produit de la vente de Valor à une fondation (S’AIDDES*) qu’il crée pour financer des projets de développement dans des villages des pays les plus pauvres du monde. La fondation, reconnue d’utilité publique dans le cadre de la Fondation de France, est éligible aux dons et legs. Elle finance trois à cinq dossiers par an au Bénin, au Burkina Faso, au Togo et à Madagascar.

Jean-Loup Guibert, qui vient de fêter ses 82 ans continue, avec l’aide de sa femme Claude, à piloter cette fondation. Il ne cache pas qu’une aide serait la bienvenue pour leur permettre de lever le pied. « Nous aimerions trouver un relais pour la recherche de financements et de dons et nous aider à étudier les dossiers », déclare-t-il.

Installés quasiment à temps plein dans les Hautes Alpes « l’air y est plus sain qu’à Paris », il continue de se passionner pour la marche en montagne. Lors de ses séjours ponctuels à Paris, il développe son relationnel pour la fondation S’AIDDES et se tient au courant, autant que faire se peut, de l’activité de l’AVARAP. Il prépare une petite surprise pour les 40 ans de l’Association.

 

www.saiddes.org

 

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